LAICITE // Au sujet de la subvention pour la grande mosquée de Metz

Au cours du dernier conseil municipal de Metz, une subvention de 490 000 € pour la construction d’une grande mosquée à Metz a été votée. La proposition émane du maire François Grosdidier, fervent partisan du Concordat, voire de son extension au culte musulman. La majorité municipale a voté pour, l’extrême-droite a voté contre. A gauche, plusieurs positions se sont exprimées. Les élus communistes se sont abstenus. Pierre Laurent, conseiller municipal communiste, a prononcé à cette occasion une explication de vote au nom de nos élus, que nous reproduisons ci-dessous.

Les communistes de Moselle le redisent: nous réclamons la fin du Concordat et, dans l’attente de cette abrogation, nous ne soutiendrons aucune initiative visant à le renforcer ou à l’étendre à d’autres cultes.

Explication de vote de Pierre Laurent:

Article 2 de la loi concernant la séparation des Eglises et de l’Etat :
La République ne reconnait, ne salarie ni ne subventionne aucun culte.
La loi de 1905, succède au concordat partout en France (du moins, ce qui était la
France à l’époque). Une loi acceptable pour tous, permettant, pour Aristide BRIAND
de trouver un juste milieu entre ceux qui veulent maintenir la prépondérance de
l’Eglise catholique, et ceux qui veulent éradiquer la religion. Cette loi, qualifiée par
Jaures de loi juste et sage, devient un des piliers de la République, de notre
République laïque.
Laïcité trop souvent détournée et instrumentalisée par la droite et particulièrement
l’extrême droite pour chercher à interdire et à diviser.
Pourtant, la laïcité et la loi de 1905, permettent à chacun, la liberté de conscience et
la liberté de manifester son appartenance religieuse. C’est la liberté pour chacun
d’exprimer sa religion, de la pratiquer ou de l’abandonner.

Le meilleur moyen de ne favoriser personne et de n’empêcher personne étant le
principe de neutralité de l’Etat.
De ce point de vue il est évident que chaque pratiquant, chaque culte doit avoir le
droit de pratiquer, y compris dans un édifice servant à l’exercice public du culte. Pour
autant avoir le droit à cet édifice ce n’est pas forcément avoir le droit de le faire
financer par l’argent public.

Alors me direz-vous, nous sommes en Moselle et nous avons encore le concordat.
Un héritage de l’histoire, qui n’était pas destiné à persister mais que nous trainons
encore aujourd’hui. Pourtant la Moselle est bien partie intégrante de la République
française. République une et indivisible, qui le sera d’autant plus quand la loi de 1905
pourra s’appliquer partout.
Il y a plusieurs cas de figure à distinguer, je crois. Certains édifices sont propriétés de
l’état ou des collectivités, d’autres non, certaines dépenses sont obligatoires, d’autres
non, et certaines dépenses sont directement liées à la sauvegarde du patrimoine et
monuments historiques, d’autres non.
Partout en France, les édifices cultuels propriété de l’Etat et des collectivités sont
entretenus par l’Etat et les collectivités. Les collectivités peuvent même aider pour
des travaux de réparation et d’accessibilité des lieux de culte dont elles ne sont pas
propriétaires.

De plus, les communes et les départements peuvent garantir les prêts contractés par
les associations cultuelles pour construire des édifices du culte. Les communes
peuvent aussi consentir des baux emphytéotiques aux associations cultuelles
moyennant un loyer symbolique.
Même en Moselle, même sous concordat, nous devrions nous astreindre à ne pas
aller au-delà des termes de la loi de 1905 et commencer à faire le chemin nous
permettant de sortir de ce vieux contrat entre l’Etat et l’Eglise catholique permettant
de salarier les ministres du culte, au frais de l’Etat.
Pour rappel, chaque année, les
salaires et pensions des ministres des cultes payés par l’Etat s’élèvent à la modique somme de 54,7 millions d’euros. Peut-être une broutille, mais est-ce normal pour un
Etat dit laïque ? Et attention, pas tous les cultes, seul ceux reconnus par le
concordat. L’inégalité de traitement étant constatée, et la construction de tous les
édifices imaginables n’y compensant rien, il faudra bien se résoudre à l’admettre,
plus nous finançons les cultes, plus les inégalités se creusent et les angles morts se
multiplient.

La seule solution viable, pérenne, pleinement laïque et égalitaire vis-à-vis du reste du
territoire de la République, c’est l’instauration de la loi de 1905, partout, même en
Moselle.
Aucun risque pour notre régime local d’assurance maladie, issue des lois
Bismarck et pour nos jours fériés, ils ne sont pas régis par le concordat et la loi de
1905 mais bien par le code du travail.
Alors aucun risque de voir un recul social, aucun risque de perdre deux jours de
congés.
Pour rappel, en 2021 un sondage Ifop montrait que 78% des français sont contre le
Concordat et, plus intéressant encore, 52% des alsaciens et mosellans.

Pour ne pas pérenniser un concordat en bout de souffle, pour ne pas mettre le doigt

dans un engrenage, véritable fuite en avant, il nous faut rester droits et solides sur
nos valeurs Républicaines, et ne pas surenchérir. Nous pouvons, même en Moselle
faire le choix de coller au plus près aux termes de la loi de 1905.
Favorisons la construction de la Mosquée en nous portant garant pour les prêts
contractés, en garantissant comme c’est déjà le cas un bail emphytéotique, mais ne
tombons pas dans la spirale du financement directe de l’édifice cultuel, tout comme
nous ne devrions pas non plus subventionner l’arrivée d’un nouveau culte au temple
de Queuleu. Ces précédents ne combleraient pas plus d’inégalités qu’ils n’en
créeraient de nouvelles.
En ces temps troublés, où l’extrême droite raciste, xénophobe et anti républicaine fut
aux portes du pouvoir, la laïcité et la loi de 1905 sont notre ciment. Les croyants de
tous cultes, mais aussi les non croyants, doivent pouvoir vivre ensemble pour
protéger notre République.

Au cœur du commun combat
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Ecrivait Aragon…

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